4 ans. J'avais tenu 4 ans. Pas une seule cigarette. Je me suis arrêtée du jour au lendemain sans aucune aide ni substitut. Je m'étais juste dit tiens fais voir ce que ça fait si je fume pas aujourd'hui? Et puis j'ai recommencé le lendemain , le surlendemain, et un jour dans la rue je me suis entendue répondre à un passant qui me demandait une cigarette "non, je ne fume pas". Pas "j'essaie d'arrêter" ou "je ne fume plus". Juste "je ne fume pas". J'étais devenue une non fumeuse. J'étais capable de boire mon café du matin sereinement sans l'associer à la cigarette. Les apéros avec les potes se passaient aussi merveilleusement bien. J'étais sevrée. J'étais libre. Ca a duré 4 longues et belles années.
En avril de cette année, on m'a découvert une vilaine fissure sur l'astragale (les douleurs duraient depuis des mois), et je me suis retrouvée en arrêt maladie, avec comme injonction de marcher en béquilles dorénavant. Après avoir consulté la moitié du corps médical parisien, je me suis retrouvée bredouille avec la même conclusion à chaque fois: "Y'a rien à faire mademoiselle, c'est une des lésions les plus longues à guérir, armez vous de patience". Haha. Moi, patiente. Mais laisse-moi rire.
Rajoutons à ça une rupture en juin, et un déménagement. Voilà, nous y sommes. Nous voici réunis, ma solitude, ma non-vie sociale, mon chat et moi, dans mon 14m2. Et c'est comme ça que la cigarette, cette bitch, est revenue dans ma vie. Elle s'est manifestée d'abord sous forme d'idées: tiens, je suis bien là sur cette terrasse au soleil, avec une cigarette ça serait cool. Ou encore: mais quelle journée de merde!! Je fumerais bien une petite clope pour me calmer...
Je pense sincèrement que le principal carburant de cette envie a été l'ennui. Plus les jours passaient, plus l'envie montait. Les moments où je pensais à la cigarette se rapprochaient de plus en plus. Jusqu'à ce que l'idée ne me quitte plus.
Le 5 juillet, une amie organise un picnic dans un parc. Il fait beau, il fait chaud, on rigole, on est bien. Il faut que je fume. Je harcèle donc tout le monde, jusqu'à ce qu'une personne craque et me donne une cigarette. Que je vais garder bien au chaud jusqu'à chez moi. J'ai fumé la moitié tellement elle était dégueulasse. Pourtant, le lendemain , je suis partie m'acheter un paquet. J'ai fumé 10 cigarettes en 3 jours, et j'ai jeté le paquet. Parce qu'à la 10ème cigarette, je commençais à reprendre mes habitudes d'ex-fumeuse.
J'aurais pu en rester là, ça aurait pu n'être qu'un petit incident de parcours. Mais non. Le 27 juillet je pars rejoindre des amis à Hossegor pour cinq jours mémorables de vacances. Un soir, au bar près de la plage, on boit des coups dehors, on est bien. Je suis un peu pompette. Et je m'entends dire à un pote 'tiens fais voir ta clope'.
Au retour des vacances, j'arrête à nouveau. Pendant deux mois, je n'ai cessé de lutter contre mon envie de cigarette. Un jour je fume, j'arrête trois jours, et ainsi de suite. Seulement voilà. Les jours où je résistais, je me jetais sur la nourriture, alors que ce problème-là était censé être réglé (j'y reviendrai dans un futur article). J'ai même appelé Info Tabac Service. Ils sont plutôt compétents, mais je n'ai pas réussi, et j'ai lâché prise... Cette lutte me rendait malade, d'autant plus que je refusais de reprendre les kilos que j'avais perdus, et surtout de voir mes vieux démons resurgir.
J'ai donc décidé de reprendre la cigarette, sans tenter quoi que ce soit pour arrêter. Pour autant, je ne suis pas en paix avec moi-même (comme quand j'étais fumeuse autrefois). Je ne supporte pas l'odeur de tabac sur mes vêtements, et même si je fume à la fenêtre, ça ne change pas grand chose, mon appartement est imprégné de cette odeur horrible. A quoi ça sert de revenir de la laverie avec du linge qui sent bon la lessive si c'est pour sentir le tabac froid dès la première cigarette? L'argent jeté par les fenêtres, n'en parlons pas. Mais surtout, surtout ce qui me rend dingue, c'est que je suis esclave de cette drogue. Complètement dé-pen-dante. N'importe quelle émotion déclenche l'envie de fumer. Qu'elle soit positive ou négative. Tout est prétexte à fumer. J'ai fini de manger: je m'allume une clope. Je lis un bouquin: je fais une pause nicotine. Je déguste un verre de vin: je l'accompagne d'une cigarette. Je suis énervée: je fume. Je suis bien: je fume. Je déprime: je fume. Je m'ennuie: je fume. Je sors du ciné: vite, vite une clope.
Dernièrement je me suis même surprise à me dépêcher de finir de manger pour allumer ma cigarette. N'importe quoi!
Vous avez sans doute remarqué depuis quelques jours qu'il fait froid. Comme il est hors de question que je fume à l'intérieur (pauvre petit chat!), je continue de fumer à la fenêtre, en enfilant mon manteau, mon écharpe, mon bonnet et mes gants...ri-di-cule.
Lundi matin, pendant le combo habituel café-clope, je me rends compte que je ne bois mon café que pour fumer. J'en fume une deuxième, je me concentre sur chaque bouffée. Sur mes sensations. J'approche la cigarette de mes lèvres, mais je m'arrête en plein vol, je réfléchis, je me sonde de l'intérieur et je sens bien que je ne veux pas fumer, que mon corps ne veux pas fumer.
Nous sommes mercredi soir, je n'ai pas refumé depuis. Demain, j'ai de nouveau rendez-vous avec une tabacologue-nutritionniste de Tabac Info Service. J'ai aussi acheté des gommes Nicorette aux fruits. J'ai commencé un petit journal de bord dans lequel je note toutes mes sensations. Parce que je sais que ces sensations sont engendrées par des idées, des pensées, et qu'il suffirait que je change ces pensées pour me défaire de cette dépendance.
C'est vraiment pas facile, des fois j'aimerais lâcher prise, m'abandonner à la facilité et replonger. Pour vous faire un idée, imaginez que vous êtes dans le métro, en route vers la gare pour partir en vacances. Et d'un coup, vous réalisez que vous avez oublié votre billet de train/avion. Vous voyez cette montée d’adrénaline qui vous tord les boyaux en même pas une seconde? Et bien voilà. Voilà ce que je ressens quand j'ai une furieuse envie de fumer et que je me retiens. J'ai remarqué que quand l'envie devient urgente, je suspens involontairement ma respiration et je contracte mes abdos, je me recroqueville, comme si je recevais un coup de poing dans le ventre. Quand l'envie est vraiment trop forte et que je commence à fantasmer ma cigarette, que j'imagine les sensations me procureraient une bouffée, je respire un bon coup, j'enfouis ma tête dans mon écharpe qui sens bon la lessive, je mange (malheureusement), j'essaie de chasser les pensées dans ma tête, et je me souviens combien il est doux d'être délivré de cette drogue, combien il est agréable de se lover dans un petit salon de thé au chaud tandis que les fumeurs se gèlent les mimines en terrasse.
J'aimerais beaucoup que vous me racontiez votre expérience avec la cigarette!!
Je vous embrasse.
P.S: Maman, si tu me lis, sorry I lied! Don't be cruel.
Je ne fume plus depuis octobre 2012 et je m'y tiens, trop heureuse de cette liberté mais je ne me sens pas à l'abri de replonger.
RépondreSupprimerJe sais qu'une taff suffira alors je m'abstiens parce que vraiment, je n'ai pas envie de refumer. Mais c'est dur parfois encore.
Oh oui je te confirme qu'une seule misérable taff te fait replonger...
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